Suivant l’exemple de Robinhood aux États-Unis, nous voyons apparaître en Europe de plus en plus de neo courtiers offrant, via une application mobile facile d’utilisation, la possibilité d’acheter des Actions et des ETF sans commission. L’ouverture de compte, les achats et ventes de titres et même la tenue de compte sont 100 % gratuits. Comment ces courtiers Bourse nouvelle génération se rémunèrent-ils ? Est-il forcément plus intéressant pour l’investisseur particulier de faire appel à ce type de courtier en ligne ? Notre décryptage.
Quel est le business model de Robinhood, le courtier Bourse sans commission sur ETF et actions ?
Il existe une multitude de solutions qui s’offrent aux courtiers Bourse pour monétiser leur activité, au-delà même du model classique de commission par transaction. Chaque neo courtier aura un mode de fonctionnement qui pourra différer de ses concurrents, utilisant plutôt une solution qu’une autre pour générer des profits.
Nous allons nous pencher aujourd’hui sur le cas de Robinhood, qui est sans aucun doute le précurseur dans la démocratisation des marchés financiers auprès des investisseurs particuliers.
Quand il s’agit de marchés financiers et de Bourse, il y a toujours deux univers qui évoluent en parallèle. Les Bourses centralisées d’un côté (comme Euronext, London Stock Exchange ou Xetra) et d’un autre côté, les transactions OTC (de gré à gré).
À noter, bien qu’étant le plus connu, la Bourse n’est qu’un moyen comme un autre d’échanger des titres. Il est aussi possible d’échanger des titres en OTC, sur des MTF (Multilatéral Trading Facilities) et dans des « Dark Pool ».
Le recours aux Market Makers
Si la plupart des courtiers Bourse traditionnels donnent accès directement aux Bourses pour permettre à leurs clients d’acheter et vendre des Actions et des ETF, Robinhood a choisi de prendre une autre direction.
Robinhood n’envoie pas les ordres de leurs clients sur une Bourse (comme le NYSE ou le NASDAQ), mais à des « Market Maker » tel que Citadel, lesquels sont ravis de recevoir des flux d’ordre en direct, sans passer par la Bourse, ravis au point de payer Robinhood en échange de ce flux de transactions. Voilà donc la première source de revenu de Robinhood.
Notons aussi que c’est de cette manière que Robinhood permet le trading d’actions fractionnées, car il n’est pas possible sur une Bourse d’acheter pour 0,01 % d’une action. En revanche, il est possible de le faire en OTC en regroupant les ordres de plusieurs clients via un accord avec le « Market Maker » pour gérer le risque qui en découle.
Ainsi un investisseur particulier va avoir plus facilement accès à une action Amazon qui cote plus de 3 300 USD ou à une action Alphabet (Google) qui cote plus de 1 900 USD.
Pour les ETF, acheter sur le marché primaire (c’est-à-dire au prix de la création et du rachat de part) via un « market maket » est possible pour une multitude d’intervenants, pour autant qu’ils acceptent d’acheter pour un certain montant. Cela permet d’obtenir un meilleur prix que celui coté en Bourse. Ainsi, on peut voir sur le site de GraniteShares par exemple qu’il est possible d’acheter des ETF directement auprès du « Market Maker » (Natixis) si le montant de la transaction est d’au moins 50 000 USD. Encore un moyen pour les courtiers en ligne de ne pas nécessairement passer les ordres en Bourse et d’obtenir des meilleurs prix que ceux qu’ils donnent à leurs clients.
Il s’agit alors pour le courtier en ligne d’intervenir comme un grossiste pour aller obtenir en OTC de meilleurs prix afin de pouvoir offrir les prix normalement accessibles en Bourse sans commission aux investisseurs retails.
Si vous vous demandez ce que fait le « Market Maker » avec les flux d’ordre des clients, alors vous devez savoir que cela reste relativement opaque. Généralement, les flux seront utilisés dans le cadre d’activités de trading algorithmique (type haute fréquence) ou encore pour la couverture de risques inhérents à des produits structurés. Ce dont on peut être sûr, c’est que les « Market Makers » sont prêt à payer pour obtenir ces flux de transactions.
Bien que la pratique puisse sembler inquiétante, elle reste néanmoins autorisée et réglementée. Les régulateurs veillent toujours à ce qu’il n’y ait pas d’abus en défaveur des investisseurs particuliers. Il faut souligner que de nombreuses industries cherchent, comme Robinhood, à créer des raccourcis afin d’offrir un service plus compétitif. Ce que Robinhood a mis en place permet à des millions de petits investisseurs d’avoir un accès simplifié aux marchés financiers à très faible coût, et même gratuitement.
Le prêt d’actions à d’autres investisseurs
Le deuxième mode de rémunération dans le « business model » de Robinhood, c’est le prêt des actions que vous possédez, pour permettre par exemple à d’autres investisseurs d’obtenir de l’effet de levier ou de pratiquer la vente à découvert. Cette pratique (peu connue) permet de récupérer un rendement supplémentaire sur les actions qui dorment dans votre portefeuille. Bien-sûr, les bénéfices réalisés par le prêt de vos actions restent dans la poche de Robinhood. C’est une partie importante de leur source de revenus. Notons que des courtiers en ligne comme Interactive Brokers ont aussi recours au prêt d’actions, mais en partageant les revenus que cela génère avec le client, à condition d’avoir au moins 50 000 USD d’investissement.
Bien que recevoir une rémunération en échange d’un prêt d’action puisse sembler attractif, seulement très peu de courtier Bourse le propose et les conditions sont bien souvent inaccessibles pour de nombreux investisseurs particuliers. Puisque ce modèle économique permet de pouvoir investir en Bourse sans frais, de nombreux petits porteurs y trouveront plus d’avantages que d’inconvénients.
L’utilisation des sommes déposées non-investies
Et pour finir, la troisième source de revenus de Robinhood repose sur les intérêts perçus avec les sommes déposées non-investies sur les comptes de leurs clients. Aux États-Unis, le cash ne dort jamais. Notons aussi que certains courtiers traditionnels offrent un intérêt sur les sommes non-investis déposées sur votre compte. Il ne faut donc pas forcément foncer tête baissée dans la gratuité.
Il est cependant aussi important de prendre en considération que les taux d’intérêt sont bas depuis plusieurs années. Rapporté sur 100 USD de liquidité non-investie d’un compte de trading de 1 000 USD, il ne s’agirait d’un manque à gagner que de quelques centimes par an.
Courtage en ligne : faut-il forcément opter pour la gratuité ?
Pour reprendre le célèbre adage « quand c’est gratuit, c’est toi le produit », on peut imaginer des courtiers Bourse offrant la gratuité sur les frais de bourse en échange d’un partage des données de leurs clients. Il ne faut pas oublier que dans le cas d’une entreprise comptant des millions d’utilisateurs, la monétisation de la « data » peut-être une source de revenus considérable surtout quand il s’agit de données financières. Nous ne savons pas si Robinhood monétise les données financières de leurs clients car rien n’est indiqué à ce sujet sur leur site web. Cependant, les conditions d’utilisation ne l’interdisent pas.
Enfin, nous attirons votre attention sur le fait qu’au moment de choisir son courtier Bourse, les prix pratiqués par les brokers sont certes des éléments importants à prendre en compte mais la grille tarifaire ne doit pas l’emporter sur toutes autres considérations. Il est primordial de sélectionner un courtier en ligne adapté à son profil et ses besoins. Ainsi, Robinhood pourra par exemple convenir pour un petit porteur, jeune, désirant investir facilement depuis une application mobile et à moindre coût. En revanche, pour un investisseur averti, expert en analyse technique et fondamentale qui investit des sommes conséquentes en Bourse, il vaudra peut être mieux se tourner vers d’autres courtiers Bourse plus adaptés.
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