Les marchés boursiers restent coincés dans une spirale baissière et aucun renversement de tendance majeur n’est encore en vue. Il faut donc se contenter de tirer parti des sursauts et des rebonds techniques inévitables mais forcément fragiles et passagers.
Les vertus anticipatrices des moyennes mobiles
N’en déplaise aux tenants de la modélisation, il n’y aura jamais de recette infaillible pour deviner à coup sûr le sens des mouvements de cours de Bourse. La part de la psychologie dans le comportement des marchés financiers est telle qu’il est dangereux de trop compter sur les éléments rationnels et fondamentaux pour croire à une hausse lorsque l’ambiance est à la déprime ou, au contraire, à une baisse lorsque le climat est euphorique. Il ne suffit pas d’être convaincu qu’une valeur est injustement bradée eu égard à la qualité et à la solidité financière du groupe qu’elle représente pour être sûr que son cours va se redresser rapidement. C’est seulement avec le temps que la situation se décante, se normalise et que les excès sont progressivement gommés. En période de crise, même les plus belles affaires sont maltraitées, voire massacrées et il en sera malheureusement ainsi tant que la confiance ne sera pas revenue sur les marchés. La visibilité est tellement mauvaise en ce moment que, faute de mieux, les opérateurs se réfugient dans l’analyse technique pour tenter de détecter des signaux susceptibles de les guider dans leurs choix. Las ! Cet outil d’aide à la décision très séduisant est loin d’être parfait et, s’il n’est pas manié avec précaution, il peut être à l’origine de grosses déconvenues.
Les cycles ne se font jamais sans à-coups
Malgré tout, la lecture des graphiques d’indices et de valeurs est toujours une source de renseignements utiles tirés certes du passé mais qui peuvent être précieux pour l’avenir. Elle nous enseigne d’abord au premier coup d’œil que les grands mouvements de fond sont plus rapides et violents à la baisse qu’à la hausse. Ainsi, l’effondrement boursier dû à l’éclatement de la bulle Internet a duré deux ans et demi en effaçant la totalité des gains accumulés pendant près de cinq ans. De même, il a suffi de vingt et un mois depuis la fin du printemps 2007 pour perdre tout le terrain qui avait été reconquis au cours des cinquante mois précédents. Seconde constatation : il n’est pas nécessaire d’être expert en vagues d’Elliott pour se rendre compte que les cycles longs de hausse ou de baisse ne se font jamais sans à-coups : ils se décomposent toujours en phases intermédiaires de correction ou de rebond que chacun peut essayer de mettre à profit pour procéder selon le cas à des renforcements ou à des allégements de position en vue de tirer parti des excès des marchés. Il convient alors d’être très vigilant et réactif à l’achat comme à la vente tant que l’on n’a pas l’assurance d’un changement de cap majeur. Ainsi, au début du printemps 2002, on avait pu croire que le pire était passé après l’impressionnante chute des cours qui avait suivi le drame du 11 septembre 2001. A Paris, le CAC 40 avait ainsi rebondi de 35 % en six mois et personne ne songeait alors à la menace, pourtant imminente, d’une nouvelle vague de baisses meurtrière qui allait ramener l’indice jusqu’à 2.403 point en mars 2003.
Le Cac 40 depuis 1995
Fondamentalement orienté à la baisse
Où en est-on aujourd’hui ? Inutile de nier l’évidence : en observant l’évolution de deux de ses moyennes mobiles, celle à deux cents jours (MM 200), qui représente sa tendance de fond, et celle à cinquante jours (MM 50), nécessairement plus réactive, l’indice de référence de la Bourse de Paris demeure fondamentalement orienté à la baisse malgré le sursaut amorcé au cours de la deuxième semaine de mars. Sa configuration technique est en effet toujours très négative : avec un écart qui atteignait plus de 960 points le 13 mars dernier, le CAC 40 reste très largement au-dessous de sa MM 200 dont la pente est encore nettement baissière. En outre, il est retombé sous sa moyenne mobile courte (MM 50) qui, elle-même, a repris le chemin de la baisse après avoir donné quelques signes d’amélioration au début du mois de janvier, puis brièvement en février. Par ailleurs, l’écart entre la MM 50 et la MM 200 demeure historiquement élevé, de l’ordre de 750 points. Pour espérer un changement de cap majeur, il faudrait que le CAC 40 repasse d’abord au dessus de sa MM 50, que celle-ci retrouve une orientation haussière, puis réussisse à percer vers le haut la MM 200, l’ultime étape nécessaire pour croire en un redressement durable étant l’inflexion à la hausse de la moyenne mobile longue. Lorsque tout va bien, en effet, comme on le pensait encore au printemps 2007, l’indice se situe logiquement au-dessus de sa MM 50, elle-même supérieure à la MM 200, toutes deux étant sur une pente ascendante. Autant dire que le bout du tunnel est encore loin. Il va donc falloir s’armer de patience avant que toutes les conditions soient remplies pour croire en un vrai renversement de tendance, solide et durable. En attendant, on doit se contenter de tirer parti des sursauts et des rebonds techniques, inévitables mais limités dans le temps. Avec des objectifs qui ne soient pas déraisonnables. Ainsi, les deux gaps (trous de cotation) que le CAC 40 a laissés derrière lui entre 2.830 et 2.861 points le 20 février dernier, et entre 2.936 et 2.961 points le 17 février ne paraissent pas hors de portée, comme la moyenne mobile à 50 jours de l’indice qui se situait le 13 mars à 2.923 points.
Le Cac 40 depuis janvier 2007
La gravité de la crise mondiale et l’absence totale de visibilité sur les résultats à venir des entreprises empêchent, en revanche, d’imaginer pour le moment des cibles plus ambitieuses, au-delà notamment de la barre psychologique des 3.000 points. Et le danger d’une rechute dans la zone comprise entre 2.000 et 2.350 points, truffée de petits gaps restés non comblés entre septembre 1996 et janvier 1997, ne peut être malheureusement écarté dans les mois à venir, en particulier si les chiffres du premier trimestre 2009 sont très mal accueillis.
Article rédigé le 16 mars 2009
Eric Dadier
Administrateur de la FFCI
Président de l’Institut d’épargne immobilière et foncière (IEIF)