La Cour des Comptes a rendu hier son rapport au gouvernement. Celui-ci s’est penché sur les finances publiques des années 2011, du début de l’année 2012 et sur les perspectives des prochaines années. Les efforts ont bel et bien commencé en 2011 mais il faudra faire encore beaucoup d’effort.
Le rapport était très attendu, tant par la PS que par l’UMP. Le PS espère s’en servir pour invoquer le mauvais héritage légué par le gouvernment précédent et justifier l’austérité à venir. L’UMP, elle, veut l’utiliser pour défendre le quinquennat de Nicolas Sarkozy.
Le déficit public très supérieur à la moyenne de la zone euro
Le déficit en pourcentage de PIB a baissé de 1,9% au cours de l’année grâce, entre autres, à l’interruption du plan de relance. Malgré cela, le déficit de la France reste supérieur à celui de la moyenne des pays de la zone euro (5,2 % contre 3,8 %)
Le graphique ci-dessus représente le solde public. S’il est négatif, on parle de déficit. Le fait que la courbe du solde français soit sous les autres courbes signifie donc que son déficit est plus élevé.
Le gouvernement Sarkozy n’est pas parti sans payer l’addition
Contrairement à ce que sous-entendaient les socialistes ces derniers jours, le gouvernement précédent n’a pas laissé trop de mauvaises surprises dans les finances publiques.
Les mesures qui n’ont pas été chiffrées par le gouvernement Fillon (le dixième mois des bourses étudiantes, les opérations extérieures du ministère de la défense, la « prime de Noël » , l’allocation adultes handicapés) seront compensées par le budget de réserve. Ce genre de situations apparaît à peu près tous les ans et n’est pas propre aux changements de gouvernement.
Objectifs budgétaires
4,4% du PIB de déficit en 2012
Il faut trouver entre 6 et 10 milliards d’euros. Ce n’est pas seulement une promesse de campagne du candidat socialiste, c’est surtout un engagement vis-à-vis de l’Europe dans le cadre du programme de stabilité sur lequel repose la crédibilité de la France.
3% du PIB de déficit en 2013
Cela représente 33 milliards. A nouveau, faire diminuer jusqu’à 3% du PIB la dette est un engagement vis-à-vis de l’Europe.
L’Etat dispose de deux leviers pour redresser les comptes : réduire les dépenses et augmenter les recettes.
Réduire les dépenses de l’état
Mieux utiliser l’argent
« Pour la santé, l’éducation, la formation professionnelle, par exemple, la France dépense bien plus que des pays dont les résultats, dans ces domaines, sont pourtant sensiblement meilleurs que les nôtres. » – Didier Migaud
Ainsi, les économies « ne remettr[aient] pas en cause le coeur de l’action publique ». La Cour des Comptes recommande d’utiliser l’argent public de manière plus productive, en améliorant la productivité des services publics, suivant l’exemple de certains de nos voisins européens, comme la Suède.
« Les exemples internationaux montrent que les consolidations budgétaires les plus efficaces sont celles qui ont privilégié le levier des dépenses par rapport à celui des recettes. » – Rapport de la Cour des Comptes
Choisir les investissements publics sur le critère de la rentabilité
« Les méthodes d’évaluation, actuellement utilisées pour mesurer ces niveaux de rentabilité dans plusieurs domaines comme les transports et l’énergie, sont insuffisamment transparentes et ne guident pas toujours efficacement les décisions publiques. » – Rapport de la Cour des Comptes
Ce point d’autant plus important que d’importants projets récents comme le Grenelle de l’environnement et le Grand Paris induiront à terme une forte croissance des investissements publics.
Limiter les dépenses de l’ensemble de l’administration
« Les leviers d’action mobilisés pour rééquilibrer les comptes publics devront concerner toutes les dépenses publiques et toutes les administrations publiques : Etat, organismes divers d’administration centrale mais aussi administrations publiques locales et administrations de sécurité sociale ». – Rapport de la Cour des Comptes
La Cour des Comptes conseille de stabiliser la masse salariale en valeur (la somme des salaires versés). Cela pourrait passer par le remplacement d’un départ à la retraite sur deux ou encore le gel de l’augmentation des salaires et des promotions.
Suivre ce conseil sans renier son programme risque fort de se transformer pour le gouvernement Ayrault en un exercice de contorsionniste.
Limiter les prestations sociales
La Cour des Comptes recommande dans son rapport de limiter les allocations familiales, les prestations de sécurité sociale et les pensions de retraites. Ces dernières pourraient par exemple être désindexées de l’inflation.
Augmenter les recettes
Réduire les niches fiscales
Prévoir une hausse temporaire de prélèvements obligatoires en privilégiant les impôts à assiette large (ceux qui touchent une grande partie de la population). Sont concernées ici la TVA et la CSG.
Conclusion
Pour Didier Migaud, ces mesures sont « nécessaires et réalisables », de même ampleur que celles qui avaient permis à la France de se qualifier pour la monnaie unique en 1997.
Le rapport souligne que d’expérience, la limitation des dépenses est plus efficace que l’augmentation des impôts.
Lydie Berget