Le high frequency trading ou trading à haute fréquence (THF) est une pratique largement répandue aujourd’hui. Bien loin de l’image d’épinal du trader hurlant et s’agitant dans une salle de marché, le trading à haute fréquence a fait entrer de plein pied les marchés financiers dans l’ère du numérique et de la technologie, pour le meilleur et pour le pire ! Café de la Bourse vous explique le fonctionnent du trading à haute fréquence et vous livre les clés pour comprendre les enjeux de cette pratique largement décriée.
Le principe du high frequency trading
Le trading à haute fréquence : une pratique utilisée par les hedge funds et les grandes banques
Le High Frequency Trading, principalement utilisé par les grandes banques et les hedge funds, repose sur l’utilisation d’ordinateurs extrêmement rapides du même genre que ceux qui font fonctionner les places financières comme le NYSE ou Euronext. Ces ordinateurs scannent des dizaines de places financières en même temps et transmettent des millions d’ordres en quelques secondes, les ordres flash. Grâce à cette technique, les traders peuvent déceler les changements de tendances avant les autres investisseurs, et les ordinateurs changent leurs ordres et leurs stratégies en l’espace d’une milliseconde.
Les bouleversements qu’impliquent le trading à haute fréquence
Le principe de base des marchés repose sur le fait que les acheteurs et les vendeurs se rencontrent et négocient jusqu’à ce qu’un prix auquel la transaction peut se faire soit trouvé.
Mais en 1998, la SEC a autorisée l’entrée de sociétés d’échanges électronique qui entrent ainsi en compétition avec les places de marché comme le NYSE ou Euronext. Ces nouvelles places ont mis au point des algorithmes et des logiciels informatiques capables de rivaliser avec ceux de Wall Street, menant à une véritable course technologique qui déterminera les gagnants et les perdants.
Le high-frequency trading booste les cours et rend les marchés beaucoup plus volatiles. Ces logiciels jaugent le marché en émettant et annulant aussitôt des millions d’ordres jusqu’à ce qu’ils décèlent le prix maximum accepté par la majorité des investisseurs. Une fois ce seuil atteint, les ordinateurs commencent à vendre en masse des centaines de milliers de titres, retournant la tendance.
High frequency trading : une technique qui désavantage les investisseurs particuliers
Cette technique désavantage notamment les investisseurs particuliers, plus lents. Les utilisateurs de ces ordres reçoivent les cotations quelques millisecondes avant le reste des opérateurs financiers ce qui leurs permet de jauger le marché et donc de se positionner dans le bon sens et d’ajuster le prix de leurs ordres. Les autres investisseurs paient donc un prix plus élevé pour acheter le même actif financier.
D’un point de vue général, les techniques de high frequency trading procurent des avantages considérables, d’où la bataille que l’on observe sur le front des innovations informatiques et mathématiques. Les principales plateformes de trading qui utilisent ces ordres, comme Direct Hedge (12% PDM, propriété de Goldman Sachs, JP Morgan, Citadel hedge fund, Knight Capital Group et International Securities Exchange) ont largement augmenté leur part de marché grâce aux “flash programs”.
Les dérives du High frequency trading
Le Flash Crash fait référence au krach boursier survenu le 6 mai 2010 aux Etats-Unis où l’indice Dow Jones Industrial Average a perdu 998,52 points avant de regagner environ 600 points, le tout en moins de trois quarts d’heure. Cette baisse de 9,2 % en l’espace de 10 minutes était sans précédent dans l’histoire. L’implication du high frequency trading dans cet incident a été ensuite évoqué. Depuis, le terme de « flash crash » ou « krach éclair » fait référence à un effondrement boursier dont la durée n’excède pas quelques minutes ou quelques secondes.
Même si un certain nombre de rapports ont depuis exonéré le trading haute fréquence comme cause de l’incident du 6 mai 2010, il n’empêche, en toile de fond, se pose en effet la question centrale et ô combien complexe de la liquidité des marchés financiers et des risques qui y sont attachés et, force est de constater que, sans informations et données fiables sur les prix, l’activité des THF devient trop risquée.
L’encadrement du Trading à haute fréquence
Aux États-Unis, le Sénateur Charles Schumer qui préside le Comité des lois et de l’administration du Sénat américain est un adversaire emblématique du trading à haute fréquence En 2009, il a demandé à la Securities and Exchange Comission (SEC) d’interdire les ordres flash (“flash orders”), utilisés dans le cadre du “high-frequency trading”. Dans une lettre adressée à la présidente de la SEC, Mary Schapiro, le sénateur Schumer menace de passer par la voie législative s’il ne réussit pas à bannir ces ordres qui, selon lui, désavantagent les petits investisseurs et remettent en cause l’intégrité des marchés. En 2014, la SEC a fait part de son désir d’encadrer le trading à haute fréquence.
Dans le cadre de la transposition de MIF 2, la deuxième mouture de la directive sur les marchés d’instruments financiers, la Commission européenne vient de publier toute une série de règles et définitions, dont celle, très attendue, des THF. Dès 2018, seront donc considérées comme telles, les sociétés de trading qui envoient au moins deux « messages » (ordres, cotations, annulations de cotation, confirmations…) par seconde sur un instrument et une plate-forme ou quatre messages sur plusieurs instruments et sur une plate-forme. En outre, les THF devront en outre conserver leurs algorithmes pendant cinq ans et offrir des informations détaillées sur leurs transactions.
La France n’avait pas attendu de telles dispositions pour sévir à l’encontre des THF aux pratiques douteuses puisque, dès 2015, l’AMF a lourdement sanctionné la Bourse Euronext et Virtu, l’entreprise spécialisée dans le trading à haute fréquence, pour manipulation de cours. C’est la première fois que le juge de l’AMF s’attaque à un acteur du trading haute fréquence, qui plus est, en reprochant à Virtu une « manipulation de cours », un manquement rarement sanctionné car extrêmement difficile à prouver.
L’étude de l’AMF sur l’impact du trading à haute fréquence sur les marchés
L’AMF a par ailleurs publié en janvier 2017 une étude sur les comportements des traders à haute fréquence durant la période allant de novembre 2015 à juillet 2016, marquée par une forte volatilité : un début d’année 2016 marquée par les craintes sur l’économie chinoise et un mois de juin caractérisé par les incertitudes liées au référendum britannique. « De telles configurations de marché peuvent avoir des conséquences sur la liquidité : les volumes négociés augmentent alors que, dans le même temps, le risque des teneurs de marché (market-makers) s’accroît, poussant ces derniers à réduire en proportion leur présence dans le carnet d’ordres » souligne l’AMF qui explique que « c’est pour analyser cette tendance que l’Autorité des marchés financiers a étudié l’activité des principaux acteurs du trading à haute fréquence, car ces derniers représentent une part importante de l’activité de tenue de marché sur les valeurs liquides d’Euronext Paris ».
Il ressort de cette étude que les acteurs du trading à haute fréquence sont un soutien important à la liquidité. « Ils sont présents plus de 90% du temps à la meilleure limite (meilleur prix proposé à l’achat ou à la vente) et représentent en moyenne 80% de la quantité présente aux trois meilleures limites du carnet d’ordres » souligne l’étude qui précise également qu’ils « entrent progressivement dans le carnet d’ordres et participent ainsi à réduire le spread (écart entre les prix offerts à l’achat et à la vente) en début de journée mais se retirent nettement du carnet en amont d’annonces attendues pouvant impacter les cours ».
L’AMF pointe du doigt le fait que les traders à haute fréquence, en moyenne, consomment plus de liquidité qu’ils n’en apportent et ce, surtout lors des périodes où la volatilité est la plus forte. Elle poursuit en indiquant que « le stress global du marché a un impact négatif sur la liquidité et se traduit toujours par une chute de la quantité proposée aux meilleures limites pour l’ensemble des participants de marché. » Enfin, l’étude du gendarme des marchés financiers précise que « les périodes localisées de stress intense sont marquées par une présence accrue des traders à haute fréquence ».
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