Rejoignez eToro et copiez les leaders. Le CopyTrading n’est pas un conseil en investissement
Les dessous du métier de directeur de la gestion Crédit

Les dessous du métier de directeur de la gestion Crédit

Découvrez le parcours, l’expérience et le métier de Responsable de la gestion obligataire d’une société de gestion d’actifs. Café de la Bourse vous invite à plonger dans l’univers de la finance de marché en interrogeant les hommes et les femmes qui y travaillent au quotidien.

Ce mois-ci, Arnaud Colombel, Directeur de la gestion Crédit chez Mandarine Gestion, revient pour nous sur son activité, ce qui l’a poussé à faire ce métier, le fait le plus marquant de sa carrière et son sentiment de marché actuel. Un décryptage utile pour investir en Bourse.

Arnaud Colombel, quelle fonction occupez-vous ? Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire ce métier ?

Je suis actuellement directeur de la gestion Crédit chez Mandarine Gestion. À vrai dire, je ne me suis jamais « programmé » pour travailler en finance, mais j’avais un goût particulier pour les mathématiques depuis tout jeune, ce qui m’a amené à aller vers un cursus en mathématiques de la décision, où j’ai découvert l’économie et la finance, puis vers un master en ingénierie financière.

Par l’intermédiaire d’un professeur en « gestion du risque crédit » de ma dernière année, je suis entré en stage chez CPR AM, d’abord au sein du service des risques, puis du département de recherche, sur les sujets obligataires. C’est là que j’ai découvert les marchés, les obligations et la gestion crédit en particulier, en me rendant compte que le métier de gérant me plaisait bien : suivre l’actualité en temps réel, discuter et débattre à propos de l’économie, construire une vue de marché puis un portefeuille et l’adapter sans cesse en fonction de l’évolution des marchés. Accessoirement, se servir parfois de modèles mathématiques pour tenter de prévoir l’avenir… Beaucoup d’éléments correspondent à ce que j’aime (toujours !) faire au quotidien.

Quel est l’événement que vous considérez comme le plus marquant de votre carrière ?

La faillite de Lehman en septembre 2008 a clairement été l’évènement le plus marquant pour moi jusque-là. Rien de très original, mais c’est arrivé finalement très tôt dans ma carrière, étant alors gérant crédit depuis à peine un an. J’avais en particulier intensément travaillé sur les structurés de crédit synthétiques (CDO de CDS) depuis mon entrée à la recherche et tout ce que nous avions fait depuis trois ans volait en éclat en quelques heures ! Il fallait rebondir vite, revenir à des choses plus basiques, mais difficile d’y voir clair au milieu de la crise…

Faire face à toute cette crise a été extrêmement formateur pour moi, surtout dans mon appréciation du risque des marchés et dans ma faculté à ne jamais trop m’accrocher à une quelconque certitude. Mais entendre sans cesse que le monde s’écroulait, et, qu’à peine commencée, ma carrière en finance était partie pour tourner court était assez décourageant, surtout quand on est jeune et (encore) influençable… Heureusement, j’ai pu compter sur une excellente entente avec mes boss de l’époque, beaucoup de travail… et une bonne dose d’humour pour surmonter tout ça !

Au final, cette expérience m’a permis de développer un vrai recul sur les marchés et de mieux gérer mon stress lors des « journées noires », que nous connaissons régulièrement sur les marchés. Aujourd’hui, je garde mon sang-froid et aborde ces périodes avec beaucoup plus de sérénité.

Quel est votre indicateur préféré et pourquoi ?

Je n’ai pas vraiment d’indicateur favori à proprement parler, nous regardons sans cesse une batterie d’indicateurs différents sur plusieurs types d’actifs du marché et, notamment, sur les différents segments du crédit. Généralement, j’aime plutôt les indicateurs simples, voire même ceux que certains qualifieraient de « simplistes » : mix de moyennes mobiles et de tendances long terme sont souvent très efficaces.

Avec le temps, je ne suis plus vraiment porté au quotidien sur les analyses techniques complexes. Finalement, j’aime bien tenter de synthétiser mes vues de marchés en les segmentant sous forme de scoring de plusieurs facteurs : un jugement qualitatif des fondamentaux de marché, une analyse plus quantitative des éléments techniques et de la valorisation de marché et un peu de « feeling » du gérant pour définir le sentiment global du marché. Cela permet, je pense, de mieux structurer ma pensée et d’avoir une vue plus holistique des facteurs influençant les prix des actifs qu’un seul indicateur, aussi sophistiqué (ou pas) qu’il soit.

Quel est votre sentiment de marché actuel ?



Notre sentiment reste toujours constructif sur les actifs risqués. L’élection de Trump est clairement favorable aux entreprises US, un prolongement du cycle de croissance de l’économie et donc une poursuite de la hausse des actions américaines. Cette élection, et la politique protectionniste qui va (a priori) s’en suivre, met l’Europe au pied du mur. Les marchés actions européens sont sous valorisés et ont donc un bon potentiel de rebond et de rattrapage… à condition, bien sûr, que les élections 2025, à commencer par l’Allemagne dès fin février, ne débouchent pas sur des situations de blocage comme cela a été le cas en France en 2024. Personnellement, je suis confiant sur la capacité de notre « vieux » continent à réagir, comme souvent quand les politiques européens n’ont plus le choix. Mais tout ne se fera pas en quelques semaines et nous passerons clairement par différents régimes de volatilité sur les marchés au gré de l’actualité, plutôt anxiogène ces temps-ci.

Côté obligataire, nous restons également confiants. Les banques centrales ont effectué leur pivot en 2024 alors que le conflit en Ukraine devrait s’arrêter sous peu, enlevant a priori un peu de pression sur les matières premières et les prix de l’énergie. L’inflation n’est donc plus un obstacle aux baisses de taux de la BCE, qui continueront de soutenir les prix des marchés obligataires en Europe. Il faut donc profiter des taux attractifs actuels, en particulier sur les maturités courtes à intermédiaires, pour bénéficier de ce contexte.

La donne est un peu différente aux États-Unis, où la politique envisagée par Trump, encore incertaine dans son application réelle, va continuer à faire craindre une possible résurgence de l’inflation et donc peser à la fois sur les prochaines décisions de la FED et sur les taux longs américains. Les niveaux atteints par ceux-ci (plus de 4,5 %) sont déjà protecteurs dans le cadre d’un investissement long terme, mais nous devrions connaître sans doute encore beaucoup de volatilité au gré notamment de la politique migratoire et des différents « tarifs » menés par la nouvelle administration.

Cette volatilité des taux n’est pas source d’inquiétude. Bien au contraire, ce contexte de marché est assez excitant pour moi :  avec une bonne analyse de l’actualité et en s’adaptant aux anticipations de marché, la volatilité des taux longs peut être une forte source de performance supplémentaire. À condition de rester flexible, garder quelques convictions mais sans s’asseoir sur des certitudes, ce contexte redonne toute sa valeur à la gestion active et au métier de gérant tel que je le conçois !

Source des images : Freepik

Toutes nos informations sont, par nature, génériques. Elles ne tiennent pas compte de votre situation personnelle et ne constituent en aucune façon des recommandations personnalisées en vue de la réalisation de transactions et ne peuvent être assimilées à une prestation de conseil en investissement financier, ni à une incitation quelconque à acheter ou vendre des instruments financiers. Le lecteur est seul responsable de l’utilisation de l’information fournie, sans qu’aucun recours contre la société éditrice de Cafedelabourse.com ne soit possible. La responsabilité de la société éditrice de Cafedelabourse.com ne pourra en aucun cas être engagée en cas d’erreur, d’omission ou d’investissement inopportun.